tic tic tic tic tic… fait ma calculatrice. Mes doigts tapotent frénétiquement sur les touches depuis plus de deux heures et je n’en sens plus les extrémités. Je suis en train de calculer le prix du livre papier « Le prince Alexander » qui sortira le mois prochain. tic tic tic tic tic… coût d’impression, charges, pourcentage librairie, frais de port : il ne s’agirait pas d’oublier quelque chose ! Car le prix d’un livre est fixe et je ne peux le changer sur un coup de tête. Une goutte de sueur glisse le long de ma tempe : et si je me plantais ? Je ferme les yeux et inspire un grand coup : allons, cela fait plus de 10 ans que j’auto-édite mes romans, je sais où je vais ! Oui, mais cette année, je suis entrepreneure et je dois donc payer des charges sur mes ventes… Petit tour d’horizon de tout ce à quoi il faut penser quand on cherche le juste prix de son livre.
Livre numérique : la cohérence avant tout
Alors non, ne commencez pas par vous lancer dans une étude exhaustive des prix pratiqués sur Amazon par les auteurs indépendants qui publient dans la même catégorie que vous. Leur situation n’est pas la vôtre. Beaucoup ne déclareront pas leurs revenus. Beaucoup aussi mettent en ligne des livres qui ne sont pas aboutis et les bradent pour attirer le lecteur. Est-ce à ces livres que vous voulez comparer le vôtre ?
Ensuite, il faut être clair : un produit numérique coûte beaucoup moins cher à produire qu’un produit physique. Autrement dit, si on fait abstraction du temps que vous avez passé pour préparer ce livre, cela vous revient moins cher de le mettre en ligne en numérique qu’en papier. Certains frais demeurent cependant : le prix du graphiste, du correcteur, les charges sociales, et votre propre rémunération. Mais pour cette dernière partie, on ne peut pas l’inclure dans le calcul de base sans risquer de faire flamber les prix !
Chez un éditeur, les prix sont encore plus réduits puisque le livre papier prend sur lui un maximum de ces frais et que la version numérique qui en découle est pour ainsi prête en même temps (pas besoin d’une nouvelle correction, la maquette n’a pas besoin d’être beaucoup modifiée, la couverture est déjà prête). Mais pour vous, auteur indépendant et fier de l’être, qui vous lancez dans l’autoédition par la porte du numérique, tous ces frais pèsent sur votre publication immatérielle.
Cependant, pour avoir longuement questionné ma communauté sur le prix des livres numériques, beaucoup de lecteurs pensent qu’il ne devrait pas être plus cher qu’un livre format poche. Grosso modo, beaucoup estiment qu’à moins de 2,99€ l’auteur est mal rétribué, mais qu’au delà de 7,99€ c’est trop cher pour un ebook. C’est qu’il ne faut pas oublier que, dans notre société de consommation, on est encore très attaché au livre-objet à mettre sur nos étagères (voir mon article précédent : « Le livre est-il un produit comme les autres ? »).
La grille tarifaire
Bref, tout cela pour vous dire qu’il ne faut pas brader votre travail (puisque vous avez fait en sorte qu’il soit à la hauteur d’une publication professionnelle, comme chez un éditeur classique), mais que vous ne pourrez pas non plus espérer vendre du numérique à 15€ comme le fait Marc Lévy (son petit dernier vient de sortir et est déjà en tête des ventes : allez-vous le lire ?).
Ce que je vous propose, c’est de vous créer une grille tarifaire. Soyez le plus cohérent possible avec votre collection de livres. Même si c’est le premier que vous mettez en vente, voyez plus loin, plus grand. Dans trois ou quatre livres, il sera un peu tard pour remanier tous vos tarifs numériques (même si cela est possible, contrairement au livre papier). Le plus simple, est de fonctionner avec un nombre de mots. Combien de mots fait votre roman à paraître ? Pensez-vous qu’il est plutôt court ? Croyez-vous qu’il vous soit possible d’en écrire des beaucoup plus longs ? Ou, au contraire, pensez-vous que les suivants seront plus brefs ? Positionnez ce roman sur une grille tarifaire qui commence à 2,99€ et ne dépasse pas 7,99€. Pourquoi 2,99€ ? Parce qu’en dessous, vous ne toucherez pas les 70% offerts par Amazon, mais seulement 35%. Et franchement, toucher moins d’un euro par livre est assez désespérant !
Parallèlement, si vous débutez en tant qu’auteur, ne visez pas trop haut non plus : vous devez attirer des lecteurs et le prix peut jouer en votre faveur. Si vos romans cartonnent dans les années à venir, vous pourrez réajuster petit à petit à la hausse vos tarifs en bougeant toujours tous vos prix pour conserver une grille tarifaire cohérente.
Les cas particuliers des premiers tomes et des intégrales
Là, ça se complique un peu. Vous ne publiez pas un roman mais toute une série. Pas de panique ! Deux cas de figure se posent, selon moi.
Soit vous êtes un auteur déjà reconnu et vous n’avez aucune raison de pratiquer un prix d’appel sur le premier tome de votre série. Dans ce cas, selon le nombre de mots de votre livre, vous respectez votre grille tarifaire à la lettre.
Soit vous vous lancez dans l’auto-édition et vous avez besoin de vous faire connaître. Dans ce cas, la pratique du prix d’appel peut vous aider. Voici l’une des façons de faire possible :
1 – Publier votre premier tome avec un prix d’appel (0,90€ est souvent une bonne idée)
2 – N’attendez pas pour publier le tome 2. Vous pouvez même le publier en même temps que le tome 1 (rappelez-vous, en tant que lecteur, le nombre de fois où vous avez été chercher le tome 2 d’un bouquin après avoir dévoré le premier ! Et la frustration de ne pas le trouver… et l’oubli qui s’en suit !).
3 – N’oubliez pas qu’en numérique on peut acheter le tome suivant en plein milieu de la nuit, donc le fait qu’il soit rapidement disponible vous assure des ventes en chaînes.
4 – Plus vos tomes seront rapidement disponibles, plus vous éviterez la perte de lecteurs entre deux tomes (au moins un tiers à chaque fois !)
5 – Vos autres tomes, par contre, sont au prix fixé par votre grille tarifaire.
Maintenant, si vous publiez l’intégrale de votre série de romans, force est de constater qu’il vous sera là aussi difficile de dépasser le seuil « psychologique » du prix du roman format poche, même si votre intégrale fait plus de 1000 pages. Bien sûr, il existe des exceptions, mais il s’agit souvent d’auteurs qui ont une grosse communauté qui les suit. Quoiqu’il en soit, l’important est surtout que l’intégrale de vos romans soit à un prix inférieur à celui de la somme de vos tomes (les lecteurs font leurs calculs, croyez-moi !)
Vous avez décidé de publier votre livre au format papier ? Génial ! La semaine prochaine, je vous expliquerai comment calculer le prix de votre roman (et prenez une aspirine avant, parce que là c’est l’enfer !).
En attendant, pourquoi ne pas aller sur ma page Tipeee pour lire la toute dernière nouvelle que j’ai écrite pour vous ?
Lorsque Daphné lance l’incantation qu’elle prépare depuis plus d’un an, Romain l’assiste en silence, inquiet. Même s’il comprend le puissant désir de la jeune sorcière de rejoindre une prestigieuse académie de magie, son cœur se brise à l’idée de la perdre. Mais la magie des mots réserve parfois bien des surprises…
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